Au lendemain d’un week-end intense, Elsa Racasan a gentiment répondu à mes quelques questions revenant sur sa saison, sur ses deux jours à Niort, en toute simplicité.
Elsa, au lendemain de tes deux finales, quel est ton ressenti?
Je suis très contente d’avoir pu de nouveau participer aux championnats de France et de me confronter aux meilleures françaises. Cependant, ma saison a été courte et je sens que je pourrais faire beaucoup si j’avais plus de temps. Je sais que je n’ai pas encore atteint mon « pic » de forme. Je n’ai commencé à m’entraîner que mi-avril à cause d’une blessure au dos, et, j’ai encore beaucoup d’énergie et d’envie de courir. Au lendemain de mes deux finales, c’est l’heure du repos, et pourtant, je meurs d’envie de continuer!
1500 ou 800 m, ou es-tu le plus à l’aise?
Je suis beaucoup plus à l’aise sur le 1500 m, sûrement, car j’ai toujours du mal à avoir confiance en ma vitesse sur le 800 m. Aussi, sur le 800, je pars toujours en retard me faisant surprendre, stressant beaucoup avant le coup de pistolet. La moindre erreur de placement ou d’accélération est difficile à rattraper, donc je sens que je ne contrôle pas la course. Sur le 1500 m, il y a beaucoup plus de tactique et de changements d’allure,donc je m’amuse plus. En revanche, j’adore la sensation de courir très vite que me procure le 800 m, et j’adore faire face à la difficulté de descendre mes records personnels de seulement quelques petites secondes… J’ai hâte de voir jusqu’où je vais pouvoir descendre!
Actuellement aux Etats-Unis, t’entraînes-tu différemment qu’en France?
Oui sans doute. Aux USA, je cours plus de kilomètres et je m’entraîne avec une dizaine de filles. Je fais des séances généralement plus longues qui me permettent de très bien développer mon endurance. Ici, en France, je m’entraîne seulement avec ma sœur et les séances sont plus espacées, plus courtes, et plus rapides. J’adore passer d’un système à l’autre, surtout que cela me permet de bien travailler les différents domaines de la course à pied. Maintenant, je vais essayer de mieux combiner les deux approches. Aux Etats-Unis, je vais faire plus de vitesse et de séances « spécifiques », et à la maison, je vais essayer de garder des sorties longues, ce qui est plus difficile avec les côtes et le manque de partenaire de course.
Entre tes deux coaches, quel est leur point commun, leur différence?
Leurs points communs sont évidents: Pascal et Jim sont tous les deux des personnes extrêmement attentives, compréhensives et, dévouées à leurs athlètes. Ils sont très enthousiastes et leur passion pour la course à pied est contagieuse. Je peux les considérer tous les deux comme des membres de ma famille, et je sais qu’ils me soutiendront toujours dans les moments difficiles. Leurs seules différences que je trouve c’est l’approche de l’entraînement (question précédente), et bien sûr la langue!
Peux-tu en quelques lignes, me retracer ton 1500 m, ton 800 m (éliminatoires compris)
800 m série: Je n’ai couru qu’un 800 m cette saison, donc je ne sais pas du tout de quoi je suis capable. Je n’ai rien à perdre, mais je dois aussi garder de la fraîcheur pour mon 1500 m. Je pars donc prudente et me place en milieu de peloton. Dans l’emballage final en revanche, je ne regarde pas derrière et je vais jusqu’au bout, car chaque seconde compte pour la qualification. Après la course, je suis satisfaite et me concentre à nouveau rapidement pour bien récupérer car ma série du 1500 m est dans moins de trois heures.
1500 m série: Il fait très chaud dehors et j’ai déjà couru mon 800 m, donc je fais un échauffement très court et léger, 30 mn dans la course. Sur la ligne de départ, je suis très sereine et je ne ressens pas de fatigue du 800 m.Cependant, je dois continuer à me préserver pour demain, alors je pars en milieu de peloton et je reste tranquille à la corde jusqu’à la fin. Je me qualifie sans trop laisser de plumes.
Après ma série du 1500 m, j’ai une douleur à ma hanche et mon ischio droit, alors j’essaie de bien récupérer et m’étirer. Papa trouve une table chez les kinés du stade, donc il me masse et me soulage la douleur.
Dimanche, avant ma finale du 1500 m, je me sens très bien malgré une nuit un peu courte. Je n’ai plus aucune douleur, pas de courbatures importantes, et je me sens fraîche. Petit-déjeuner, repos, avant de retourner au stade. Pendant l’échauffement du 1500, j’ai de bonnes sensations et je sais que je peux gagner.
Finale du 1500 m 2e en 4’23″08: En cadette comme en junior, j’avais pris l’habitude de partir toute seule devant et mener toute la course. En espoir, il faut être plus prudente. Le niveau est plus relevé, et cette saison, j’ai eu du mal à être en course. Je pars donc prudente pour être sûre de finir forte. Après un passage très lent au 1000 m en 3’06, Alice Mitard accélère et c’est parti pour l’emballage de fin de course. Je me sens très bien, alors j’emboîte le pas d’Alice et on prend de l’avance sur le reste des concurrentes. Chaque 100 m restant est de plus en plus rapide, et mes jambes répondent toujours bien. A 100 m de la ligne, nous sommes très proches et continuons à accélérer. A 15 m de l’arrivée, je suis prête à me jeter, et c’est ce que je fais par ailleurs. Nous franchissons la ligne au même moment et aucune de nous deux ne sait qui a gagné…. Alice a levé les bras en signe de victoire, et moi, j’ai « cassé » avec mon buste. Annonce du speaker qui nous informe de la photo finish. Alors pendant quelques minutes, j’ai le sentiment d’avoir remporté la course. Mais le résultat est sans appel, Alice me bat pour un tout petit centième!! Je suis dons vice- championne de France mais un peu frustrée. Mais c’est le sport, et très vite, je réalise que je n’ai rien à regretter. Après une saison si difficile, je ne peux qu’être heureuse de décrocher cette médaille! Le podium et les interviews d’après course prennent du temps, je n’arrive donc pas à très bien récupérer après la course, et mon 800 m est maintenant dans moins de deux heures. Ce n’est pas grave, je vais bien me reposer et tout donner pour ma dernière course malgré les conditions.
Finale du 800 m 5e en 2’09″80 : Mes jambes sont maintenant fatiguées, et j’ai des douleurs abdominales- sûrement à cause de la chaleur et du manque de récupération après mon 1500 m.Cependant, je me sens très bien mentalement et je suis prête à tout donner. Avant le coup de pistolet, je suis nerveuse. Je sais que les sept filles en lice sont rapides et sont toutes coureuses du 400 et 800 m. J’essaie de me concentrer sur moi-même, et me faire plaisir. J’ai eu du mal à partir vite. J’étais sur le couloir extérieur, et les filles m’ont rattrapé sur l’intérieur avant même les premiers 100 m. Tans pis, je reste à l’arrière de la course et j’essaie de me relâcher. Etrangement, je me sens bien. Mes jambes sont légères et je n’ai pas l’impression de faire beaucoup d’effort malgré le rythme rapide de la course. Je me sens beaucoup mieux que sur ma série éliminatoire! A 200 m de l’arrivée, je suis toujours avec le groupe de tête, et je suis prête pour mon sprint final. Alors que j’accélère, quatre filles commencent à prendre des mètres d’avance sur moi. Elles sont très rapides, et malgré ma résistance, je n’arrive pas à les suivre. A 80 m, je sens même que je reviens un peu sur la quatrième, et je donne donc tout jusqu’au bout. J’arrive à battre mon record personnel et faire un beau sprint final, donc je ne regrette rien!
Tu termines ta saison en beauté avec une médaille d’argent. Désormais pour toi, place aux vacances, mais avant cela, Naîs comme Margot, vont prendre part aux « France » cadettes. Seras-tu spectatrice ou plutôt supportrice de leur prestation?
Supportrice à 100%. C’est en cadette que j’ai gagné mon premier titre de Championne de France et que j’ai forgé mon ambition pour la suite. Je sais donc que c’est une étape cruciale dans leur vie d’athlète de haut niveau. C’est toujours difficile de gérer la pression quand on fait d’aussi belles performances, donc je vais tout faire pour les aider à faire un bon championnat. J’ai vu de quoi Naïs et Margot sont capables à l’entraînement, et elles sont toutes les deux des guerrières en compétition! J’ai donc très hâte de les voir s’amuser et performer ce week-end.
Margot, en finales du 2000 m steeple, quels vont être tes mots avant son départ? Même question pour ta soeur.
Margot: Si il y a une chose à laquelle j’ai appris à ne pas faire avant une course, c’est le niveau de mes adversaires. Peu importe qui est la favorite et qui t’a battue dans le passé, aujourd’hui tous les compteurs sont remis à zéro. Aie confiance en toi. Tu as fait de très bonnes séances et tu es prête. Relâche toi bien pendant la course, aie toujours l’objectif le plus haut en tête, et tout va bien se passer.
Naïs: Tu nous as montré de quoi tu es capable à de nombreuses reprises, et aujourd’hui c’est la dernière. Tu es toujours à ton pic de forme, donc n’aie aucun doute et fais ta course. Relâche toi bien et ne te laisse pas déstabiliser si tes concurrentes tentent de te défier.
Tu vas regagner Houston en août prochain, comment vois-tu ta saison de l’autre côté de l’Atlantique sur le plan sportif? Professionnel?
J’ai très hâte de voir ce que va donner l’année prochaine. En automne, je ne vais pas courir les cross, je vais donc me concentrer à la préparation physique et au repos avant la saison sur piste. J’ai encore quelques classes difficiles jusqu’en décembre, donc je vais continuer à bien balancer sport-études. Dès janvier, la charge scolaire va diminuer et je vais pouvoir me dévouer 100% à l’athlétisme. Je vais avoir beaucoup de temps pour bien m’entraîner et bien récupérer. Je sens que l’année prochaine peut-être une percée dans ma vie d’athlète, et j’ai hâte de voir ce que ça va donner! Au cours des six prochains mois, je vais décider de ce que je veux faire sur le plan professionnel pour la suite. Pour le moment, place aux VACANCES!!!
Elsa, tu m’a répondu en toute sincérité et je t’en remercie. Un entretien sans demi-mot, à ton image. Je te souhaite de bonnes vacances amplement méritées et le meilleur pour les mois à venir.
Domi